mot de la zone : Eurydice

Aujourd’hui Eurydice

 

Retranchée dans un appartement, la messagère d’Eurydice revient sur les évènements qui l’ont amenée à trahir le Groupe d’Intervention. État d’urgence, catastrophes industrielles, pollutions, montée des eaux… Au cours d’une de ses enquêtes, la messagère retrouve Orphée. Il a entrepris de redescendre aux enfers mais, hors-sol depuis longtemps, le héros n’a plus de repères… La messagère l’accompagne, le guide, lui souffle son rôle et lui montre les boucles baroques d’un monde en mouvement. Tout est lié dans ce roman aux multiples facettes qui tente de saisir les dérèglements de notre époque : réécriture du mythe, matière musicale issue de l’opéra de Monteverdi, fable écologique, poésie pétrochimique… Orphée, héros en fuite traqué par des forces contraires, et dénominateur commun de cet étonnant tumulte, cherche une main tendue. Aujourd’hui Eurydice.

Le livre se commande aux éditions publie.net,
ou dans toute librairie,
en format papier et numérique (avec boucles retroactives).
Il est accompagné d’un site « avant-scène »… eurydice-02

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une rencontre d’Orphée

 

Depuis si longtemps qu’il ne sent plus les picotements à la plante de ses pieds, ni le flux battant de ses cuisses. Ses reins, raides, sa colonne tassée. Il a trop marché le long de ces voies. Et pourtant au matin, il les poursuit encore, celles qui fuient la parallèle.

Le chemin de fer arrive au bout du pont-tournant, où roulent les rayons de soleil qui se jettent sur les gesnêts et déboulent la colline entre les pins, les orchidées et dans la garrigue, jusqu’à la mer. La Méditerranée. Deux ou trois tankers en station. Des panaches sur la rive s’échappent des cheminées rayées de rouge et de blanc aux pieds desquelles s’agglutine un contingent de cylindres blancs. Une torchère lance sa flamme à l’aube qui rosit. L’argade conduit son souffle mêlé de gaz, de ciste et de thym. C’est là le front de l’ère industrielle. Il le sait, mais il y a cette voix. Va plus loin. Pas d’éclat où tu vas.

L’ancien chenal se tient fixe entre ses rives droites où filent, entre fenouils et genêts, des rails désaffectés le long d’une terre barbelée. Monceaux ocre et gravas gris barrent l’horizon. Des palmiers sont venus se planter dans l’asphalte qui se craquèle. Ils signalent son arrivée par un bruissement de papier. Une voiture passe. Renault 12 bleu ciel. Il se plaque au mur déchiqueté, le seul qui reste, ses chaussures se prennent dans des tôles en tas, ondulations d’amiante à ses pieds. Et si c’était là ? Il lève les yeux et se récite la généalogie qu’on lui a apprise. Kuhlman, Ugine, Pechiney, PUK. Ato, Atochem, Elf, Atofina. Azur Chimie, Albemarle, ICIG, ci-gît, c’est fini. > Lire la suite

qui l’eût crue !

Quand il pleut à verse et que l’eau monte. Surtout quand l’eau monte en fait — je me souviens. Je sors mes photos et je me souviens. La Louisiane. On y est allé enquêter cet été sur des paysages en voie d’extinction…

C’est parti on the road again here we are, on the L A one. C’est là qu’ils nous ont dit de venir, sur l’ancienne L A One. Mais la route sur laquelle on est, là, en fait, c’est la deuxième L A One, j’veux dire, c’est celle qui remplace la première.

La nouvelle LA ONE, Louisiana 2016, © zoneclaire pour Urbain, trop urbain

La nouvelle Louisiana Highway ONE, Louisiana 2015 © zoneclaire

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hypothèse eurydice

Un air de Monteverdi au bord de l’empire de la pétrochimie. Une messagère annonce une perte… et les enfers ne sont pas loin, leur port, leur bouche… le flot à la bouche à Port-de-Bouc.

Captation sonore Film Flamme de la performance Et si revenait Eurydice… donnée à la médiathèque Boris Vian de Port-de-Bouc le 18 avril 2016 comme restitution de résidence au Centre des arts Fernand Léger de Port-de-Bouc en décembre 2015.

un homme au musée

 

Je veux remercier, ici devant vous aujourd’hui, l’anthropologie contemporaine de s’occuper enfin de l’homme moderne. C’est à me faire regretter ne pas être anthropologue moi-même et de n’avoir pas contribué à la documentation de cet objet omniprésent et surtout devenu omnipotent sur, dans et au-dessus de la terre. Le travail n’est pas terminé. Et je me réjouirais d’opérer l’un de ces retournements de représentation nécessaires aux tentatives de saisie de ce spécimen. Chacune d’elles exige encore des tours de force qu’on réalise avec peine. Déjouer le jeu des miroirs et des écrans. Suivre les réseaux des attachements, de l’électricité, du gaz, du pétrole et de l’eau. Oser les comparaisons entre ses modes de pensées, de cuisiner, de prier, de dépenser et de faire l’amour. Renoncer à la pensée universelle. Et plus difficile encore : sortir du jeu de pouvoir qu’impose la publication de ces connaissances. > Lire la suite

© zone claire 2015